Le Père Ollivier (Suite et fin)

Ce texte est un dernier extrait de souvenirs rapportés par le Père Jean-Marie OLLIVIER lui-même.

"Un certain 13 février 1961, nous sommes là, mon confrère Jean Wauthier et moi. Le matin au lever, nous voyons  à deux kilomètres du village des canons braqués dans notre direction.
Le bruit court qu'ils vont tirer sur la population qui n'accepte pas le nouveau régime. Que faire ? Aller demander grâce, c'est la moindre des choses. Nous partons donc, accompagnés de deux Anciens de la localité.  Surprise ! Ces militaires groupés autour de leurs canons et de leurs mitrailleuses ne connaissent pas un mot de la langue du pays.

     Nous en avons trop vu partout. On raconte qu'il n'y a pas de troupes étrangères dans le pays. Nous sommes arrêtés et aussitôt menottés, les deux mains derrière le dos. Je proteste. La réponse d'un Lao tombe raide : vous n'avez plus rien à dire ; vous êtes condamnés à mort et on vous fusillera tout de suite.
     Un coup de genou dans les reins et nous voilà tous les quatre à genoux par terre. Ma pipe que je trainais toujours tombe dans l'herbe. En peu de temps nous nous trouvons face à un peloton qui passe au commandement : armez ...

     Miracle ! Voici qu'au même moment arrive à toute allure une Jeep qui bloque ses freins entre le peloton d'exécution et nous. Les fusils baissent et nous nous relevons. Un Colonel pathet Lao descend de la voiture. "Que se passe-t-il ? C'est moi qui commande ici."   Suit une longue discussion qui me parait interminable ...

       Finalement  après 12 jours, renseigné par un Chinois qui était passé nous voir, le Père Rouzière qui était le Supérieur de la mission arrive jusqu'à notre lieu de détention. Depuis dix jours il nous cherchait: partout on lui disait  qu'il n'y avait pas de Pères prisonniers. Lui-même, bien renseigné par le Chinois a montré au Colonel notre cachot, à quelques mètres de son bureau. "Adressez-vous au Général qui arrive " lui fut-il répondu. Celui-ci, ami des Français, donne l'ordre de nous libérer immédiatement ..."

   Tout se termine donc bien, cette fois ... Mais le Père Jean Wauthier sera tué quelques années plus tard, le16 décembre 1967.

    Quant au Père Jean Marie Ollivier, il continuera en Haïti son ministère auprès de tous ces malades atteints de toutes sortes de maladies de la peau; jusqu'à ce samedi 18 septembre 2004 où il sera, comme beaucoup de Gonaïviens, victime du terrible cyclone qui a ravagé leur pays, emportant sur son passage des victimes par milliers ...